LA SYMBOLIQUE DES MAINS SALES
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La pièce de théâtre «Les mains sales» de Jean Paul Sartre pourrait être à elle seule, la définition de la situation actuelle dans laquelle le bassin d'Arcachon est confronté depuis des décennies.
Dans leur bureau, les deux enquêteurs attendent patiemment l'arrivée du président du SIBA (syndicat intercommunal du bassin d'Arcachon) pour entendre ses explications en audition libre et définir son rôle dans le scandale sanitaire des rejets des eaux usées dans la nature ayant entraîné une épidémie d'Escherichia coli sans précédent dans tout le territoire national avec la vente d'huîtres contaminées. La porte s'ouvre précipitamment et maître BDA alias Benoît Duclos Ader grand ténor du barreau bordelais en tenue d'apparat hurle:
«-Son Altesse sérénissime crème anti-rides alias Yves Foulon, grand souverain du royaume Arcachonie et grand protecteur environnemental du bassin d'Arcachon.»
«Foufou 1er» entre dans la pièce en se débarrassant de sa capeline bleu républicain qu'il jette au sol, remet en place la petite mèche rebelle dans sa chevelure gominée et pose son séant sur une modeste chaise en bois.
«-Messieurs, comme vous je n'ai pas de temps à perdre, alors allons à l'essentiel. Je suis un innocent aux mains pleines et en tant que président du SIBA, j'affirme n'avoir commis aucune faute car je ne commets jamais de fautes et croix de bois, croix de fer, si je mens, je vais en enfer. Dans cette sale histoire qui a sali mon honneur, il n'y a qu'un véritable coupable. L'eau de pluie… Elle qui en très grosse quantité est aussi vicieuse qu'une vipère pour retrouver au plus vite le chemin de la liberté en se servant des réseaux des eaux usées comme moyen de transport. Nos infrastructures n'ont pas pu résister à un tel flux supplémentaire et c'est avec une ignominie sans bornes qu'elle est allée souiller les eaux limpides de notre si beau bassin d'Arcachon et contaminer le travail de nos braves paysans de la mer.
-Pourtant des dysfonctionnements antérieurs avaient été déjà signalé par des associations environnementales et citoyennes.
-Allons messieurs , vous n'allez pas vous aussi tomber dans le panneau par les avis d'anarchos gauchistes écolos qui voudraient rester à l'âge de pierre, quand aux prétendus dysfonctionnements, «Sabinou» alias Sabine Jeandenand, ma directrice, soumise et dévouée, n'a sûrement pas jugé bon de me contrarier pensant résoudre rapidement ces désagréments avec le prestataire en charge Véolia qui a grassement renouvelé son contrat avec la COBAS. Les fuites d'eau courante dans le réseau sont tellement légion dans ce territoire qu'il faudrait un siècle pour les réparer. Les problèmes viennent des gueux du nord qui ne savent pas bien bétonner comme dans mon royaume ou le ruissellement est un art. Ces abrutis préfèrent diviser les parcelles au maximum. Avec 300 mètres carré ils seraient capables de bâtir 8 niches à chiens à 200 000 euros pièce.
-Vas y mollo… t'emballes pas coco lui glisse à l'oreille son avocat
-Mais tous ces maires font partie de votre conseil d'administration en tant que vice président.
BDA se lève d'un seul bond comme un ressort
-Eh oui messieurs et tous sans exception ont pris la défense de mon client. Le SIBA a su réagir pour le bien de la communauté et pour la protection de son environnement en proposant une somme de 120 millions d'euros pour y remédier.
-Votre client a pourtant demandé un droit de polluer en cas de pluie exceptionnelle. Croyez vous que cette proposition va satisfaire les professionnels de la mer?
Son altesse sérénissime lève le doigt et embraye:
-Avec les ostréiculteurs c'est différent. Tu leurs mets du pognon dans les poches et leurs larmes sont asséchées et leurs cris d'orfraie étouffés instantanément. Avec les assos c'est plus coriace. Si elles pouvaient me pendre haut et court, elles le feraient. Je vais les anéan...
-Ça suffit.. intervient BDA, mon client est innocent et n'a commis aucunes fautes dans cette affaire. J'ai moi même défendu la directrice du SIBA lors de sa garde à vue et la conclusion est que c'est Véolia qui est responsable et coupable de n'avoir rien fait.
Son AS se lève en enfilant sa capeline.
-Voilà tout est dit messieurs alors finissons en car mon avocat commence à coûter très cher au contribuable. Avec les heures de garde à vue de «Sabinou» et les 20000 balles d'aujourd'hui, je pense qu'il va pouvoir offrir à toute sa famille, petits enfants compris, quinze jours à l'île Maurice dans un resort 5 étoiles. Donc messieurs… comme le dit mon avocat. Véolia est le coupable. Au revoir messieurs…»
Le bonhomme n'a pas perdu de temps pour filer fissa au salon de l'agriculture afin d'y rencontrer notre «Mignon premier» alias Emmanuel Macron qui en promenade dans les allées en compagnie de sa ministre aux poches remplies de conflits d’intérêts, pour lui redemander de l'oseille afin de compenser les pertes de la profession lors du scandale sanitaire lors de l'hiver 2023-2024. Le «Ché Labanos» alias Olivier Laban président du comité régional de la conchyliculture d’Arcachon Cap ferret veut absolument que le pollueur paye sans jamais dire qui est vraiment le pollueur. Alors pour ne contrarier personne, il a décidé de construire trois forages d'eau salée autour du bassin afin d'isoler les huîtres dans les claires avec de l'eau propre en cas de nouvelle crise afin de permettre à la profession de vendre et de ne pas fermer les dégustations. Voilà comment son action est proposé à la presse pour l'opinion publique.
A première vue, on pourrait dire que cette initiative représente le pansement sur l'hémorragie mais qui ne solutionne en rien le problème de pollution sur la bassin d'Arcachon. Elle légitime même le droit de polluer voulu par le SIBA. Certes le Norovirus ne circulera pas dans une eau qui contient quand même des métaux lourds et autres saloperies mais en cas de nouvelle crise sanitaire(de plus en plus probable à l'avenir) le consommateur ne retiendra qu'une seule chose, que le bassin d'Arcachon est souillé de nouveau et qu'aller déguster ou acheter des huîtres même protégées dans les claires s'annonce un tantinet périlleux. On est à mille lieues de la devise du territoire «Un milieu sain pour un produit sain» Quoi qu'il en soit le «Ché Labanos» dira et à juste raison que le seul coupable, c'est l'eau de pluie… sauf que l'eau de pluie ne nettoie pas les mains sales.