En ce 15 aout 2011, nous étions invité à fêter les 50 ans de Doc et comme à son habitude, il n’avait pas lésiné sur le bling bling. J’étais au collège avec lui et ce gars m’aimait bien. Fils d’un docteur et d’une professeur d’art il était celui qui avait tout avant les autres avec toujours un maximum d’argent de poche ce dont je profitais allègrement. Il avait brillamment réussi ses études et aujourd’hui il dirige une clinique privée. Mais c’était surtout grâce à lui que j’avais rencontré Marco. Alors j’avais accepté son invitation pour revoir ce vieil ami d’enfance qui était invité lui aussi et  à qui je devais une partie de mon éducation musicale, même si au départ c’était plus pour approcher sa sœur Valérie qui faisait fantasmer tous les mecs.

A cet instant, après trois jours de marche Yasmina arrive enfin dans un camp prés de Mogadiscio. Les pieds en sang, serrant contre elle son enfant de deux ans elle s’approche des petites tentes blanches en essayant d’apercevoir le fameux croissant rouge qui pourrait aider Amin.

la villa au Canon des parents de Doc était plus somptueuse pour recevoir les 150 invités. Dans le jardin, de petites tentes en toiles étaient installées protégeant l’énorme buffet d’un grand traiteur. Les plats étaient magnifiques. Garnis et décorés avec soin. Des tranches de foie gras empillées en jeu de carte, une multitude de tapas en un patchwork de couleur, des verrines étincelantes aux recettes improbables, huitres et fruits de mer à foison, plateaux de légumes frais en julienne avec différentes sauces, des barbecues prêt à accueillir des cotes de bœuf de Bazas, des bars de ligne à l’œil luisant, des caisses entières de Champagne et vins millésimés permettaient aux convives de festoyer gaiement de petit groupe en petit groupe.

Yasmina s’approche des deux jeunes qui gardent l’entrée du camp. Il ont à peine dix huit ans et sont en train de se chahuter. Casquette américaine sur le crane, dents jaunis par la nicotine ,yeux rouges et Kalachnikov en bandoulière, ils reprennent leur sérieux à son approche. L’un des deux lui dit:
« _ Dégages, il n’y a plus de place pour toi.
_Je veux voir un docteur, juste pour Amin »
Un violent coup de crosse dans la tête l’envoie dans la poussière ocre du désert.

Marco n’était pas encore arriver mais je me rappelais de notre première rencontre. C’était un introverti qui vivait dans sa bulle avec une guitare toujours à portée de main. Un musicien hors pair. Nous nous étions découvert mutuellement et nous passions de longues soirées ensemble. Dans sa chambre aux volets clos, il brancha une Gibson noire sur un vieux ampli Marshall puis monta le volume pour me balancer ce riff:

 
L’autre gamin relève Yasmina et Amin pour les diriger vers la tente au croissant rouge, sous les rires de son copain.

Près des tapas un groupe était en train de rire aux éclats. Le banquier était en train de s’étouffer avec une tranche de Serrano coincée dans la gorge et tout le monde se foutait de sa gueule. Le Doc lui envoya une grande tape dans le dos qui fit sortir l’objet du délit:
_ Alors mon banquier, tu te goinfres encore plus. Tu en as jamais assez. Au fait, toi aussi tu vas devenir philanthrope ? C’est à la mode en ce moment. Les riches veulent être taxé davantage. Mais ou allons nous mon cher banquier?

http://www.20minutes.fr/economie/771510-monique-pincon-charlot-les-riches-sentent-dangers-situation-actuelle

-Tu n’as pas changé, tu es toujours aussi lumineuse.

Valérie me répondait par un délicieux sourire car elle ne pouvait pas me renvoyer la même réponse. Certes, j’ai encore du charme….. mais mes beaux cheveux se sont évaporés et mon embonpoint a légèrement atténué mon côté érotique. J’étais très troublé de la revoir trente années après. Nous avions vécu une semaine entière complètement fusionnelle , à baiser comme des lapins sans décoller de la chambre avec toute l’insouciance de l’adolescence.

Yasmina couchée au sol avec le canon de la kalachnikov sur la tempe tente de résister au coup de boutoir sexuel de son agresseur.

Valérie était partie au petit matin pour Paris ne me laissant que l’odeur de son corps sur ma peau

Les yeux d’Amin se referment comme un coucher de soleil et le dernier souffle qui arrive au visage de sa mère ne pourra jamais sécher les larmes de celle-ci.

« _  Ton frère ne vient pas?

_ Just one shoot. » dit un des gamins

_Le Doc ne t’a rien dit ?

Une détonation qui fracasse le crane de Yasmina. Juste une balle, pour ne pas gâcher.

-Marco est mort il y a deux ans d’un AVC. »

Le feux d’artifice démarra à cet instant précis et les cris de joies des enfants n’arrivaient même plus à couvrir ma tristesse. A vrai dire, je n’avais plus faim ce 15 aout 2011.





Pour ce changer les idées, je vous offre cette vidéo qu'il faut regarder au 3 ième voir 5 ième degré. Attention certaines paroles peuvent choquer mais c'est bon de rire un peu.